La jurisprudence a opéré un revirement sur l’acquisition des congés payés

Le code du travail prévoit que les salariés acquièrent des congés payés à hauteur de 2,5 jours par mois de travail effectif (article L3141-3 du code du travail).

L’article L3141-5 du code du travail
prévoit que certaines périodes d’absence sont assimilées à du temps de travail effectif. Ainsi, les périodes de congés payés, de congé maternité, de paternité et d’accueil de l’enfant et d’adoption, les contreparties obligatoires en repos, les jours de repos en vertu d’un aménagement du temps de travail supérieur à la semaine, les arrêts de travail consécutifs à un accident du travail ou de maladie professionnelle dans la limite d’un an et les périodes pendant lesquelles le salarié se trouvent maintenues ou rappelées au service. 

La jurisprudence était constante sur le sujet : les salariés en arrêt maladie n’acquéraient pas de congés payés, les salariés en arrêt suite à un accident de travail et une maladie professionnelle acquéraient des congés payés dans la limite d’un an. 

Toutefois, suite à plusieurs arrêts de la Cour de Cassation, celle-ci a opéré un revirement de jurisprudence. 

En effet, dans le cadre de ces arrêts, elle a affirmé que  :

- Les salariés malades continuent d’acquérir des congés payés sur la période d’absence 
- Le code du travail ne peut imposer une limite d’un an à l’acquisition des congés payés pendant une absence pour accident du travail ou maladie professionnelle 
- Le point de départ d’une demande d’indemnité de congé payé, prescrite normalement par la prescription de 3 ans relative aux salariés, ne court pas si l’employeur n’a pas pris les mesures nécessaires pour permettre au salarié d’exercer effectivement droit à son congé payé.

 

Suite à ces arrêts, le conseil constitutionnel a été saisi de deux questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) dans lesquelles la Cour de cassation lui demandait si, à défaut d’être conforme au droit et à la jurisprudence européenne, les articles L.3141-3 et L.3141-5 du code du travail, qui soit privent les salariés en arrêt maladie de tout droit à l’acquisition de congés payés  soit privent les salariés en arrêt pour maladie professionnelle d’acquérir des congés au-delà d’un an, sont conformes à la Constitution (Cour de cassation, sociale, 15 novembre 2023, n°23-14.806).

Le Conseil constitutionnel a ainsi répondu que ces deux articles du code de travail ne portent pas atteinte ni au principe d’égalité, ni au droit au repos du salarié. Il a par ailleurs précisé qu’il était loisible au législateur d’assimiler à des périodes de travail effectif les seules périodes d’absence du salarié pour cause d’accident du travail ou de maladie professionnelle, sans étendre le bénéfice d’une telle assimilation aux périodes d’absence pour cause de maladie non professionnelle. Il rajoute qu’il était également loisible au législateur de limiter cette mesure à une durée ininterrompue d’un an. 

Pour autant, la réponse du Conseil constitutionnel n’invalide pas la réponse apportée par la Cour de cassation dans ses arrêts du 13 septembre 2023. En effet, bien que les articles du code du travail précités sont bien conformes à la Constitution, il n’en reste pas moins qu’ils demeurent contraires au droit européen. De cette manière-là, l’employeur demeure bien tenu d’accorder des congés payés aux salariés en arrêt maladie au risque de se voir condamner par le Conseil de Prud’homme à indemniser ou à octroyer ces congés au salarié dès son retour en entreprise.

 

Il semble qu’il soit toutefois indispensable que le législateur intervienne rapidement sur le sujet afin de clarifier cette situation et de mettre en conformité le droit français par rapport au droit et à la jurisprudence européenne. De la même manière, il ne nous est pas précisé quel est délai de prescription applicable dans ces situations. Nous attendons ici les précisions des futurs arrêts qui émaneront des juges, ou une prise de position claire du législateur. Effectivement, il est probable que le législateur intervienne afin de fixer une règle visant à limiter les impacts financiers de ces dernières jurisprudences.

 

 


Pour aller plus loin, voici le communiqué de presse de la Cour de Cassation sur ces arrêts : cliquez ici.

Ainsi que la décision QPC du Conseil constitutionnel : cliquez ici.

 

 

 

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